Louis-Philippe Dalembert
Louis-Philippe Dalembert est un écrivain haïtien. Vous le connaissez peut-être ? Sans doute ? Pour ma part, j’ai abordé ses romans depuis quelques semaines seulement, mais je rattrape le temps perdu… J’en suis au troisième !
À partir d’un fait d’actualité ou d’histoire, Louis-Philippe Dalembert déroule un récit comme un tapis sur lequel on avancerait sans savoir si l’on marche dans la réalité ou dans la fiction. C’est tout l’art de ses romans qui font le tour d’une question à travers des personnages imaginés.
Dans Milwaukee Blues, l’élément déclencheur est le décès de George Floyd à Minneapolis, mais le rôle principal est joué par Emmett et la scène se passe à Milwaukee. Emmett, on en fait la connaissance par tous les témoins qui s’expriment sur sa vie et sur sa mort, depuis le commerçant pakistanais qui a appelé la police jusqu’à une ancienne institutrice. Chaque chapitre est un témoignage qui cerne, petit à petit, les conditions de vie dans les quartiers pauvres des villes américaines. Mur Méditerranée entraîne dans un autre parcours, celui de trois femmes, syrienne, nigériane et érythréenne, issues de situations différentes, mais embarquées toutes les trois dans un voyage vers l’Europe qui traverse la Libye et la mer Méditerranée sur un bateau de fortune. Là encore, les situations sont approfondies et donnent à réfléchir, loin des clichés souvent entendus. Un roman précédent, Avant que les ombres s’effacent, rappelle le rôle joué par la modeste République d’Haïti dans l’accueil des personnes juives dans les années 1940. Qui se souvient aujourd’hui des prises de position courageuses de cette petite république à peine sortie de l’occupation américaine et géographiquement si loin de l’Europe ?
Louis-Philippe Dalembert aime son île, un peu d’Haïti traîne plus ou moins dans ses romans. À travers un personnage ou un fait historique, il loue le courage de son peuple. Il peut aussi décrire une pluie paradisiaque qui afflue avec poésie sur les collines de l’île.
Il rend ses personnages émouvants en peignant leur caractère avec finesse et en ne tombant jamais dans le piège de la violence. Sa rédaction des événements vécus par ces personnages s’arrête au bord du supportable, leur permettant ainsi de garder toute leur dignité. C’est aussi une forme de respect pour le lecteur et sans doute le choix de favoriser la connaissance et la réflexion au détriment d’images qui seraient inutilement choquantes.
Enfin, Louis-Philippe Dalembert est un décodeur de la société qui, tout en décrivant avec justesse des situations réalistes, porte un message d’ouverture aux autres et d’optimisme. Voilà qui nous invite à le lire en ce début d’année 2022 !
Les livres